Pour l’instant je n’ai pas eu l’occasion de vous parler de mon addiction, celle qui vide une partie de mon compte en banque et remplit de manière frénétique mes étagères.
Alors oui, ce n’est pas une obsession dangereuse, ça ne fait de mal à personne, et certains diront que c’est plutôt quelque chose à encourager.
Mais croyez moi, ce n’est pas nécessairement le cas.
Mon obsession maladive concerne les livres. Mais pas juste le fait d’en lire beaucoup. Non. J’aime posséder des livres. Je trouve l’objet livre absolument magnifique. J’en profite d’ailleurs pour lancer un appel aux maisons d’éditions (qui sont certainement NOMBREUSES à me lire « joke ») : faites un effort sur les couvertures. La beauté de l’objet participe au plaisir de découvrir le récit à l’intérieur du livre.
Mais si je vous parle de cette obsession, c’est aussi pour vous expliquer que lorsque j’ai connaissance de la sortie imminente du nouveau livre d’un.e auteur.ice que J’ADORE, je ne peux PAS attendre. Il me le faut, là maintenant, tout de suite. Et ce, même si dans les faits je ne vais pas le lire tout de suite… Ma frustration s’évapore instantanément, dès lors que je le détiens entre mes mains. Allez comprendre.
C’est exactement ce qu’il s’est passé avec ce nouvel ouvrage.
Les Strates (écrit par Pénélope Bagieu – Gallimard Bande Dessinée – 144 pages – 2021)
Avant de commencer, je me dois de vous dire tout l’amour que je porte à Pénélope Bagieu. Je l’ai découverte quand j’étais adolescente dans les vidéos et articles du magazine féminin en ligne Madmoizelle. Et depuis, je la suis dans toutes ses aventures. Je ne loupe aucune de ses interviews. Et je dois reconnaître qu’elle a fortement contribué à mon apprentissage féministe.
C’est donc tout naturellement que lorsque j’ai entendu parler de son dernier opus, je me suis jetée dessus. Enfin, disons que je l’ai précommandé car il ne sort que le 10 novembre. Et là, ceux qui me lisent le jour de la publication de cet article vont se demander : y a t il une faille spatiotemporelle ? Comment peut-elle parler d’un livre qui n’est pas encore sorti ? Voyez-vous, c’est en cela que les choses de la vie sont bien faites : j’ai reçu Les Strates le 7 novembre grâce à la magie d’Amazon (oui bon je le confesse parfois j’achète mes livres sur Amazon, je ne suis qu’une femme comme les autres d’accord ?!). Pour accompagner cette belle nouvelle, j’ai fait ce que je ne fais pas toujours. J’ai directement commencé (et terminé) ma lecture.
Les Strates est un essai autobiographique. Pénélope Bagieu nous fait part de tous ces moments de vie qui ont fait d’elle la femme qu’elle est aujourd’hui. Les questions ou incompréhensions adolescentes, les traumatismes qui, d’une certaine façon, lui ont permis de se construire. En bref, toutes ces strates qui la constituent.
Ce livre est plein de poésie et d’émotions. Il ne s’agit pas d’un récit linéaire mais d’une compilation de moments de vie. Le fait que le dessin soit en noir et blanc apporte d’ailleurs beaucoup à ce côté rétrospection/introspection. Le trait est puissant, et j’ai aimé le fait qu’on puisse facilement la reconnaître dans chacune des cases. J’ai notamment beaucoup aimé les planches « Déjà-vu » dans lesquelles elles racontent des évènements similaires qu’elle a pu vivre à plusieurs années d’intervalle, et face auxquels elle a réagi, ou non, de manière similaire.
Pénélope Bagieu est sincère et touchante dans cet ouvrage, ne jetant le voile sur aucun aspect, même les plus sombres. Mais surtout, j’ai ressenti beaucoup de bienveillance vis à vis de l’adolescente qu’elle a été. Bien sûr il peut y avoir un certain amusement sur les emportements dramatiques propres à cet âge ou encore les fausses croyances qu’on développe quand on est enfant, sans doute pour se protéger. Mais j’ai trouvé remarquable à quel point à aucun moment ses émotions adolescentes ont été travesties ou moquées. Bien au contraire. C’est avec beaucoup de tendresse qu’elle parle de cette jeune fille qu’elle était. Je tiens à le souligner car en règle générale on lit des récits qui ont tendance à tourner en dérision cette période de la vie. Mais c’est oublier à quel point l’enfance et l’adolescence sont essentielles, et que chacune de nos réactions, aussi peu nuancée puisse-t-elle être, est on ne peut plus authentique et sincère.
A la lecture de son livre on comprend que l’autrice cherche à interroger la jeune fille qu’elle a été, mais aussi à la féliciter pour ce qu’elle est devenue. On comprend aussi comment des évènements plus ou moins insidieux, ou incohérents ont fait germer en elle la petite graine du féminisme.
Si bien sûr on en apprend davantage sur elle, on ne peut s’empêcher de faire un parallèle avec nos propres vies, et nos propres questionnements. Elle évoque des sujets qui parleront à toutes, tant les sujets abordés sont universels. Naturellement j’ai pensé à celle que j’étais, adolescente, et j’ai essayé d’avoir un regard plus doux sur cette jeune fille en construction qui a fait du mieux qu’elle a pu pour traverser cette période étrange.
Je pense que c’est aussi ça le propos de ce livre.
Merci à elle pour ça.
Enfin, je me dois de souligner la beauté du livre. Il prend la forme d’une sorte de carnet Moleskine avec une couverture souple extrêmement agréable au toucher. Je vous l’ai dit, l’objet livre et le soin apporté à sa couverture ont une importance capitale pour moi. Et là c’est un sans faute. En plus d’être un merveilleux récit, c’est un très beau livre auquel j’ai pu donner une place de choix dans ma bibliothèque.
J’ai lu ce livre d’une traite. Mais n’hésitez pas à prendre votre temps pour admirer les détails du tracé. Vous allez sourire, vous allez pleurer, mais surtout vous allez l’aimer.
4 Comments
Anne Sophie
8 novembre 2021 at 5 h 08 minRien que le dessin sur le livre me donnait envie de le lire.
Mais maintenant que j ai lu ton article encore plus.
Merci pour tes articles plus intéressants les uns que les autres sur des sujets auxquels je ne m intéresse pas de base, tu arrives à donner envie à travers tes écrits d’aller voir de plus près chacun des sujets que tu développes.
Hate de lire un prochain article 😃
Du Sable Sous Le Bitume
8 novembre 2021 at 8 h 09 minMerci beaucoup! Hâte d’avoir ton avis après la lecture du livre. <3
Joyce
10 novembre 2021 at 14 h 48 minToujours aussi intéressant ce que tu dis, ce que tu ressens et que tu nous transmets. Tu animes toujours on ne peut plus ma curiosité, moi qui pourtant ne suis pas du tout une grande lectrice malgré que j’aimerais l’être. En lisant ton point de vue, on comprend que le titre est bien choisi. Ça a l’air léger à lire, mais prenant à la fois. Ça donne envie de l’ouvrir ce livre
Du Sable Sous Le Bitume
11 novembre 2021 at 22 h 56 minMerci beaucoup pour ton commentaire. Je pense en effet que même pour quelqu’un qui n’est pas un grand lecteur, ce livre est parfait. Les sujets abordés nous touchent tous voire, surtout toutes. Les dessins sont magnifiques. Bref, encore une fois le grand talent de Pénélope Bagieu est à l’oeuvre.